Article Lettre de Charles Emond

La Caisse et le conflit à Gaza : mise au point

Notre organisation Montréal,
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Alors que plusieurs allégations circulent sur les choix d’investissement de La Caisse dans le contexte du conflit à Gaza, nous souhaitons exprimer clairement notre position sur des questions qui, bien que légitimes mais très complexes, peuvent mener à de fausses interprétations. Nous prenons très au sérieux nos responsabilités envers les Québécois.es pour qui nous investissons et nous respectons nos engagements en matière de droits de la personne.

Attention aux amalgames

D’abord, nous nous préoccupons de la crise humanitaire à Gaza et du sort de la population palestinienne dans l’ensemble du Territoire palestinien occupé (TPO) par Israël. C’est pourquoi nous avons agi. Aucun nouvel investissement en Israël et dans le TPO n’est actuellement autorisé à La Caisse. À travers le monde, peu de fonds institutionnels ont pris un engagement similaire. La Caisse l’a fait parce qu’elle a des principes qui la distinguent et parce que c’est ce qui s’impose dans le contexte actuel. Aujourd’hui, c’est moins de 0,05 % de notre portefeuille qui y est investi et il s’agit d’investissements détenus par une poignée de nos gestionnaires externes.

Au début du mois, nous avons été l’un des deux seuls fonds de pension ciblés dans un rapport affirmant que nous investissons délibérément dans des sociétés qui contribuent à la destruction du peuple palestinien. C’est faux et regrettable qu’on nous prête ces intentions et qu’on nous distingue de la sorte. Il est plutôt question d’investissements dans des multinationales telles que Booking.com, Airbnb et Google, qui ont des activités partout dans le monde, dont une infime partie dans cette région. Il faut se rappeler que ces titres sont détenus par essentiellement tous les grands investisseurs et des particuliers dès qu’ils placent leur argent à la bourse. Aussi, il serait beaucoup trop simple d’insinuer qu’une famille utilisant Airbnb pour ses vacances ou une entreprise qui a recours à Google encourage et finance ce qui se déroule à Gaza. Quant à une entreprise comme Lockheed Martin pour laquelle La Caisse a une exposition de 0,025 %, on ne finance pas la société puisqu’on achète des actions déjà en circulation sur les marchés, qui font partie de paniers de titres standards.

Un rôle d’influence

Notre responsabilité va bien au-delà de simplement maximiser des rendements. Nous tenons compte d’un ensemble de facteurs dans nos décisions d'investissements, et nous exprimons clairement nos attentes en matière de droits de la personne. Nous sommes conscients que, pour des multinationales où nous sommes un investisseur parmi des milliers d’autres, cette influence est limitée. C’est pourquoi nous allons plus loin. Lorsque La Caisse ne peut influencer seule une société pour qu’elle améliore ses pratiques, nous utilisons les services d’une firme externe mondialement reconnue, Federated Hermes, qui s’active auprès des entreprises sur ces questions au nom de plusieurs actionnaires pour en maximiser l’impact. Au Québec, comme à l’international, La Caisse se fait toujours un devoir de tirer vers le haut les sociétés dans lesquelles elle est investie. Et cette approche est plus constructive que de désinvestir au profit d’investisseurs peu préoccupés par ces questions.

Nos investissements mènent nécessairement à des débats internes, sains et nuancés, pour prendre les meilleures décisions possibles dans un monde devenu infiniment complexe.

Le monde évolue, La Caisse aussi

Aujourd’hui, les chaînes d’approvisionnement sont profondément intégrées et il est extrêmement difficile de tracer une ligne entre les entreprises qui ont des politiques pourtant claires et l’utilisation finale de leurs produits par leurs clients. C’est ce qui rend compliquée la notion de désinvestissement de certaines sociétés, telles que Caterpillar, qui fabrique des machines pour usage dans la construction, incluant des grands projets d’infrastructures.  

La géopolitique évolue rapidement et les enjeux qui touchent nos sociétés et les investisseurs aussi. Dans ce contexte, le secteur de la défense chez nous et nos alliés est appelé à se redéfinir et à croître. Alors que la sécurité des populations est au cœur des préoccupations internationales, nous croyons qu'il est nécessaire d'élargir nos horizons et de voir comment nous pourrons appuyer les entreprises au Québec, notamment dans notre secteur de l’aéronautique, le troisième en importance au monde, ou celui des technologies de pointe.

La Caisse a comme double mission de faire fructifier le bas de laine des Québécois.es et de participer au développement économique du Québec. Il est bien possible que le secteur de la défense, qui contient plusieurs segments, en fasse partie. Est-ce que cela veut dire de faire tout et n’importe quoi? Évidemment, non. Soyez assuré.e.s qu’au-delà de nos obligations légales, nous serons toujours guidés par notre sens des responsabilités et nos principes, et nous n’oublierons jamais pour qui nous travaillons : les 6 millions de Québécois.es qui nous font confiance pour leur retraite.

Face à des enjeux changeants, complexes et sensibles, qui suscitent des débats dans la société, nous devrons continuer d’avoir un dialogue constructif et d’évoluer, ensemble. Nous travaillons sans relâche pour vous rendre fiers de notre organisation, de nos implications et de nos réalisations.

Vous pouvez compter sur nous.


Charles Emond
Président et chef de la direction

La Caisse


Cette lettre d'opinion a également été publiée dans l'édition du 16 juillet de La Presse

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